
Le Sibérien, de Son Origine Jusqu’à Nous
Ses Origines
Le Sibérien, aussi appelé « Sibirska Koschka » ou « Sibi », est un chat ancestral que l’Homme connaît depuis des siècles. Bien qu’il ait vécu à l’état sauvage en Russie, ses origines restent en partie hypothétiques. On s’accorde cependant à dire qu’il résulte d’un croisement entre :
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Le chat domestique apporté par les colons russes en Sibérie
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Le chat sauvage autochtone, notamment du plateau sibérien central et des monts Oural
Sur le plan génétique, des études ont montré que le gène FGF5, responsable du poil long chez les félins, aurait émergé dans des populations domestiquées exposées à des climats froids. Chez le Sibérien, cette mutation aurait été naturellement sélectionnée, favorisant la survie dans des environnements rigoureux.



De la Sibérie à la Russie
La Sibérie (Сибирь, Sibír’) constitue la partie asiatique de la Russie, couvrant 13,1 millions de km², soit 77 % de la superficie du pays, mais abritant seulement 27 % de sa population. Son climat continental rigoureux, caractérisé par des hivers extrêmes atteignant -30 °C, rend la survie animale difficile en l'absence de compagnie humaine.

La région a longtemps été peuplée de tribus nomades, limitant les possibilités de domestication du chat sauvage. L’environnement hostile – longues périodes enneigées, présence de carnivores tels que loups, lynx et renards – favorisait les félins robustes et dotés d’une morphologie adaptée.

L'Expansion Russe et la mutation du Sibérien
Longtemps habitée par des populations pastorales de langues ouralo-altaïques, la Sibérie a été progressivement colonisée par l’Empire russe à partir du XVIIᵉ siècle.
L’expansion commence par l’occupation des bordures septentrionales avant de s’étendre aux côtes, contournant les portes caspiennes. À la suite de la Révolution russe, les territoires caucasiens sont soviétisés sous le nom de République socialiste. Le régime soviétique poursuit l’exploitation forestière et initie l’extraction minière, gazière et pétrolière au XXᵉ siècle.
L’arrivée massive de colons russes s’accompagne de chats domestiques venus d’Asie centrale et du Moyen-Orient. Précieux chasseurs de rongeurs, ces chats s’intègrent naturellement dans le quotidien des populations sédentaires et agricoles.

Il est fort probable que la mutation « poil mi-long » et « poil long » se soit produite en Russie (Transcaucasie) et qu’elle se soit propagée vers la Turquie (Angoras) et la Perse (Persans). Le Sibérien présente un phénotype clairement identifiable et il est vraisemblablement la sous-espèce orientale du chat des bois européen, dont l’habitat s’étend au Caucase et à l’Asie Mineure.
Les chats originaires du Moyen-Orient diffèrent nettement des chats à poil court classiques. Cette divergence résulte d’origines génétiques variées : les chats à poil mi-long du Moyen-Orient auraient reçu une part significative de matériel génétique issu de croisements avec différentes espèces de chats sauvages et domestiques.
Parmi ces ancêtres, Felis lybica, le chat sauvage africain, joue un rôle fondamental. C’est à partir de cette espèce que les premières domestications félines ont eu lieu, environ 9 000 ans avant notre ère, dans le Croissant fertile (actuelle région de l’Irak, de la Syrie et d’Israël). Le Felis lybica lybica, sous-espèce la plus souvent citée dans les études génétiques, est considéré comme le progeniteur direct du chat domestique moderne (Felis catus). Ce félin, naturellement sociable et plus tolérant à la présence humaine, aurait été attiré par les réserves de grains et les rongeurs des premiers villages néolithiques.



Le Felis Silvestris Lybica
Au fil des millénaires, les descendants du Felis lybica se répandent en Europe, en Asie Mineure et en Asie centrale. Ils y rencontrent et parfois s’hybrident avec d’autres sous-espèces sauvages comme le Felis silvestris caucasica ou le Felis silvestris silvestris. Ces croisements enrichissent la diversité génétique des chats de ces régions, donnant naissance à des populations plus robustes, mieux adaptées à des climats variés — notamment aux conditions extrêmes de la Sibérie.
On distingue encore aujourd’hui différentes sous-espèces apparentées au Sibérien. En Transcaucasie, par exemple, un chat sauvage connu sous le nom de Felis silvestris caucasica présente une ressemblance frappante avec le Felis silvestris silvestris européen.



Le Felis Silvestris Caucasica
Le Sibérien a connu un développement naturel, sans intervention humaine. Sa fourrure épaisse avec un sous-poil isolant important et un poil mi-long lui a permis de s’adapter au climat hivernal rude de la Sibérie.
L’épaisse fourrure du Sibérien se compose de trois couches distinctes (poil de couverture, poil intermédiaire et sous-poil laineux), une adaptation morphologique comparable à celle observée chez le renard arctique ou le loup sibérien.

Répartition des Felis Silvestris dans le monde. http://www.wikipedia.org
De la nature à la reconnaissance officielle
Le développement du Sibérien s’est fait de manière naturelle, sans intervention humaine, jusqu’au XXᵉ siècle. Sous l’Union soviétique, la possession d’animaux de compagnie, surtout de race, était fortement réglementée, voire découragée. Cela explique pourquoi le Sibérien est resté méconnu du monde félin international pendant longtemps.
Les premières mentions officielles de chats de type sibérien apparaissent dans le livre illustré Brehms Tierleben, publié en 1925 par Alfred Edmund Brehm, où il est question d’un chat à poil mi-long vivant dans le Caucase.



Chat-léopard de Sibérie Prionailurus bengalensis euptilura Elliot, 1871
Les premières expositions félines modernes ont lieu au Crystal Palace de Londres en 1871, bien que le tout premier rassemblement documenté remonte à une kermesse en Angleterre en 1598. Le Sibérien y est présenté sous le nom de « Russian Longhair », mais sans reconnaissance officielle.

La première exposition officelle de félins à Cristal Palace. (Livre "Chats pratique" par David Taylor.)
De la Russie à l’Europe et au monde
Ce n’est qu’en 1984 que l’élevage du chat Sibérien débute officiellement en Russie, à Leningrad (aujourd’hui Saint-Pétersbourg), sous l’impulsion des clubs félins KOTOFEI et KIS. Le premier standard est rédigé en 1987, puis révisé à Francfort en 1988.
Entre-temps, des ingénieurs allemands travaillant à la pose de conduites de gaz en URSS découvrent ces chats et en ramènent plusieurs en Allemagne, notamment dans les régions de Leipzig et de Berlin. Parmi eux, Hans et Betti Schulz, fondateurs de la chatterie Newskij, deviennent les premiers éleveurs européens de la race avec MUSSA, une femelle red tabby et blanche, et TIMA, un mâle, tous deux importés de Saint-Pétersbourg en 1987.
La chute du mur de Berlin en 1989 facilite ensuite l’exportation du Sibérien vers l’Europe de l’Ouest.
En 1990, le World Cat Federation (WCF) finalise un standard officiel, incluant toutes les couleurs traditionnelles ainsi que les colorations colorpoint, connues sous le nom de Neva Masquerade (Newskaja Maskaradnaja). À cette époque, seulement une quinzaine de chats Sibériens étaient recensés en Europe occidentale.
La même année, les éleveurs américains Elizabeth Terrell et David Boehm, de la chatterie Starpoint, importent les premiers Sibériens aux États-Unis depuis Saint-Pétersbourg. À la surprise générale, ces chats remportent rapidement des prix face au Maine Coon, considéré comme l’icône féline outre-Atlantique.

Les Felis Silvestris Caucasia. http://www.arkive.org

Les Felis Silvestris Europea. © Étoile Neva
En France, le Sibérien apparaît officiellement en 1991. Il est reconnu, ainsi que le Neva Masquerade, en 1992 par la WCF.
Le pédigree du Sibérien doit absolument refléter son origine russe. Quelques dernières retouches du standard ont été apportées à Paris en 1995, en collaboration avec le Livre Officiel des Origines Félines (LOOF) et la Cat Fanciers Federation (CFF). M. Imran Okulov, ex-membre du comité de direction de KOTOFEI, et le Dr. Phil. Irina Sadovnikova ont proposé une nouvelle version du standard, acceptée par le WCF.
En 1997, le premier Sibérien Neva Masquerade arrive en Californie dans l’élevage WILLOWBROOK. Cette même année, la race est également reconnue par la Fédération Internationale Féline (FIFé), suivie en 1998 par l’association internationale du chat TICA, qui adopte toutefois un standard propre.
La race Sibérienne est donc désormais officiellement reconnue, mais elle reste encore relativement peu connue du grand public.
La première exposition consacrée aux chats Sibériens en France s'est tenue le 22 janvier 2006 à Thiers, rassemblant 25 représentants de la race, classiques et Neva Masquerade confondus. L’événement fut organisé par la Société Féline Auvergne Bourbonnais Limousin (SFABL) en partenariat avec l’association Chat-de-Sibérie.
Reconnaissance et instances félines
Le Sibérien est aujourd’hui reconnu par les principales fédérations félines internationales :
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La FIFé (Fédération Internationale Féline) : elle regroupe de nombreux pays européens et reconnaît le Sibérien depuis 1997.
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La Fédération Féline Française (FFF) : partenaire de la FIFé, elle œuvre au rayonnement de la race sur le territoire français.
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Le LOOF (Livre Officiel des Origines Félines) : organisme français officiel chargé de la tenue du registre généalogique félin, il a adopté le standard du Sibérien en collaboration avec les clubs russes.
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La TICA (The International Cat Association) : très influente en Amérique du Nord, elle accepte le Sibérien depuis 1998, avec un standard distinct.






